La mort est peut-être le dernier grand tabou de notre société. On parle de tout — ou presque — mais quand il s'agit de notre finitude, les mots nous manquent. Pourtant, ouvrir le dialogue sur la mort peut transformer nos relations et nous préparer à l'inévitable. Comment s'y prendre ?
Pourquoi est-ce si difficile d'en parler ?
Plusieurs raisons expliquent notre difficulté à aborder le sujet :
- La peur — Parler de la mort, c'est reconnaître qu'elle existe, qu'elle nous concerne
- Le déni collectif — Notre société valorise la jeunesse et repousse la mort dans l'ombre
- La superstition — Certains craignent qu'en parler, on « attire » la mort
- La protection — On veut épargner ses proches, ne pas les inquiéter
- Le manque de modèles — On n'a jamais appris à avoir ces conversations
Et pourtant... ne pas en parler a un coût. Des volontés non exprimées. Des regrets. Des conflits familiaux après un décès. Des deuils plus difficiles parce qu'on n'a pas pu dire l'essentiel.
« La mort n'est pas l'inverse de la vie. La mort fait partie de la vie. »
Les bénéfices d'en parler
Quand on ose aborder le sujet, quelque chose se libère :
- Clarifier ses volontés — Pour soi et pour ses proches
- Éviter les conflits — Les décisions sont prises en amont, ensemble
- Renforcer les liens — Ces conversations créent une intimité profonde
- Réduire l'anxiété — Ce qui est nommé fait moins peur
- Vivre plus pleinement — La conscience de la finitude donne de la valeur au présent
Choisir le bon moment
Il n'y a pas de moment parfait, mais certains contextes sont plus propices :
Les bons moments
- Après un événement naturel — Un décès dans l'entourage élargi, un film, un article de journal
- Les fêtes de famille — On est réunis, on peut partager des souvenirs
- Un anniversaire significatif — Les 60, 70, 80 ans d'un parent
- Une maladie — Un diagnostic (même bénin) peut ouvrir la porte
- Un moment calme à deux — Une promenade, un repas tranquille
Les moments à éviter
- Quand l'autre est fatigué, stressé ou préoccupé
- En plein conflit familial
- Devant un large public (sauf si c'est voulu)
- De façon brutale, sans préparation
Comment lancer la conversation ?
Le plus difficile, c'est souvent de commencer. Voici quelques phrases d'amorce :
Ce qu'il faut faire — et ne pas faire
À faire
- Écouter plus que parler
- Respecter les silences
- Valider les émotions
- Y aller progressivement
- Revenir sur le sujet plus tard
- Partager ses propres réflexions
À éviter
- Forcer la conversation
- Dramatiser ou faire peur
- Juger les réponses
- Vouloir tout régler en une fois
- Parler uniquement du pratique
- Ignorer les émotions
Les sujets à aborder
Selon le contexte et votre relation, vous pouvez explorer différents thèmes :
Les souhaits de fin de vie
- Où aimerait-il/elle finir ses jours ? (maison, hôpital, soins palliatifs)
- Y a-t-il des traitements qu'il/elle refuse ?
- Quelle place pour la spiritualité ?
- Qui devrait être présent dans les derniers moments ?
Les aspects pratiques
- Testament, mandat de protection
- Préférences funéraires (inhumation, crémation, don du corps)
- Musiques, textes, rituels souhaités
- Où sont les documents importants ?
L'héritage émotionnel
- Y a-t-il des choses à se dire, à se pardonner ?
- Quels sont ses plus beaux souvenirs ?
- Qu'aimerait-il/elle transmettre ?
- Y a-t-il des histoires de famille à raconter ?
Conseil
Ces conversations n'ont pas à être lourdes ou tristes. Elles peuvent être pleines de rires, de souvenirs joyeux, de tendresse. L'important, c'est d'ouvrir la porte. Le reste viendra naturellement, au fil du temps.
Et si l'autre refuse d'en parler ?
C'est possible, et c'est à respecter. Vous ne pouvez pas forcer quelqu'un à aborder un sujet qui lui fait peur. Voici quelques pistes :
- Ne pas insister — Laissez la porte ouverte pour plus tard
- Montrer l'exemple — Partagez vos propres réflexions, sans attendre de réciprocité
- Utiliser l'écrit — Une lettre peut parfois dire ce que la parole ne peut pas
- Passer par un tiers — Un ami, un professionnel, peut faciliter le dialogue
- Accepter les limites — Certaines personnes ne seront jamais prêtes, et c'est leur droit
Le temps des fêtes : une occasion ?
Les rassemblements familiaux peuvent être un moment propice pour ces conversations — ou au contraire un moment à éviter, selon les dynamiques familiales.
Si l'ambiance s'y prête, un repas en famille peut être l'occasion de partager des souvenirs, de parler de ceux qui ne sont plus là, et peut-être d'ouvrir doucement la porte à des sujets plus profonds.
Mais attention à ne pas transformer le réveillon en réunion de planification funéraire ! L'idée est de semer des graines, pas de tout résoudre en une soirée.
« Parler de la mort, c'est apprendre à mieux vivre ensemble. »
Besoin d'aide pour ouvrir le dialogue ?
Je peux vous accompagner dans ces conversations délicates, en famille ou individuellement.
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